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Rock Times

Rock Times: octobre 2009

29/10/2009

The Dead Weather, Paris, L’Olympia, 28 octobre 2009




Dans l'œil du cyclone


Quatre mois après avoir dévasté la Cigale, The Dead Weather revient enflammer l’Olympia. Entre temps, l’album « Horehound » est sorti, a traumatisé bon nombre de tympans et mis une claque à plus d’un baffle. Si l’association de malfaiteurs Jack White / Alison Mosshart / Jack Lawrence / Dean Fertita faisait déjà saliver en juin dernier, aujourd’hui, le groupe est totalement énorme. Et ce soir, qui plus est, dans la mythique salle parisienne.


Chargés d’ouvrir le feu, les Belges Creature With The Atom Brain déroulent, à quatre, en rangs serrés, un rock psychédélique sinueux, agressif et violent. Guitares lourdes et acides, basse vrombissante et batteur à la frappe physique, le geste souple et puissant.

L’entrée en scène des Dead Weather est tonitruante, l’effet sur le public immédiat. Et le groupe n’en fera qu’une bouchée. Déjà la belle Alison mange l’auditoire qui la dévore des yeux et lui mange dans la main. 60 Feet Tall est une déflagration. Dès le premier solo de Dean Fertita, l’échelle de Richter n’est plus que le souvenir d’un escabeau pour lilliputien. Suit Hang You From The Heavens emmenée tambours battants par un White des grands soirs. Puis celui-ci s’approche sur le devant de la scène pour prendre tout le monde à rebrousse-poil : frisson garanti alors que Fertita et Lawrence lui tissent une toile blues rythmée du seul tambourin de Mosshart. La suite est tout aussi efficace. So Far From Your Weapon se transforme en cérémonie vaudou chantée par les quatre, exorcisée par la magie de Fertita au clavier. Plus loin, Bone House est atomisée dans une fureur inouïe. Le tout dans un light show épileptique bleu-nuit et blanc-lune. Entre les flashes lumineux, en toile de fond, l’immense logo à la plante horehound semble se muer en un subliminal crâne de quelque reine des ombres coiffée d’un diadème.




Véritable déesse démoniaque, Mosshart devient de plus en plus inquiétante à mesure (démesure) qu’elle repousse toutes les limites et crache ses textes. Nymphe fantasmagorique aux poses suggestives, perchée sur les retours, secouée de spasmes dans ses danses païennes désarticulées, son corps lui appartient-il encore ?

Lorsque Dean Fertita s’affaire sur son piano électrique et que Jack Lawrence balaie la batterie pour annoncer Will There Be Enough Water, on pourrait entendre le vent soulever la poussière ; mais Jack White vient dompter sa rugissante guitare sauvage, et chanter à deux cette complainte qui se change en typhon. Quant aux nouveaux morceaux – car ces messieurs-dames ne chôment pas – ils laissent présager du meilleur.




En rappel, après le I Cut Like A Buffalo du seigneur White, celui-ci laisse une boîte à rythme dicter le tempo pour rejoindre ses acolytes et déchaîner un peu plus l’électricité. Enfin, à l’image de son clip règlement de compte, Treat Me Like Your Mother fait l’effet d’un chargeur de mitraillette vidé dans le buffet. Les tripes remuées. Bien sûr, on aurait voulu plus encore. Car l’expérience est immense, historique. The Dead Weather n’est rien moins qu’un événement majeur dans le rock. Il est là, le son du XXIème siècle.

Flavien Giraud - Rock Lives


Setlist :

60 Feet Tall / Hang You From The Heavens / You Just Can't Win [Them] / So Far From Your Weapon /
Forever My Queen [Pentagram] / Bone House / Jawbreaker (new song) / Rocking Horse / No Hassle Night / No Horse (new song) / New Pony / Will There Be Enough Water // I Cut Like A Buffalo / I Can't Hear You (new song) / Treat Me Like Your Mother


Crédits Photos : Florian Garcia


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28/10/2009

Seasick Steve - « Man From Another Time » - Atlantic Records



Happy (To Have A Job)


Quand on débute sa carrière de musicien après soixante ans, on n'a pas de temps à perdre entre la parution de chacun de ses albums. C'est donc un quatrième opus, « Man From Another Time », que le bluesman américain Seasick Steve a concocté pour début novembre. Douze morceaux au blues brut et artisanal qui transportent effectivement dans une autre époque.


« I don't know why you wanna listen to what I got to say at all / Don't you got nothing better to do ? ». Pour quelqu'un qui se pose ce genre de questions dans l'éponyme Man From Another Time, Seasick Steve ne semble pas douter tant que ça. Quatre albums depuis 2004, des tournées qui s'enchaînent et un succès toujours grandissant : les anecdotes du bluesman semblent avoir encore de belles heures devant elles.


Seasick Steve au diddley bo

L'esprit du Delta. Pour ces nouveaux morceaux enregistrés en analogique, Seasick Steve a privilégié un son authentique et des arrangements épurés. Seul le batteur Dan Magnusson, fidèle au poste pendant les tournées, a apporté sa contribution à quelques titres. Pour le reste, Steve s'est mis à nu avec les instruments rafistolés qui ne le quittent pas : three-string trance guitar, cigar box guitar et d'autres merveilles encore. Il ouvre son album sur une ode au diddley bo, sa guitare la plus rudimentaire – à une corde – sur laquelle il slide tout en expliquant gaiement et en rythme comment s'en fabriquer une soi-même. « Man From Another Time » alterne des titres rythmés et entraînants, où le pied tonique bat la mesure (Wenatchee), avec des titres très mélancoliques où la voix rocailleuse de Steve est ourlée d'à peine quelques notes (The Banjo Song). Dans l'ensemble, l'influence du Delta n'est jamais loin ; Robert Johnson pour les compositions les plus limpides (Just Because I Can (CSX)), John Lee Hooker pour Dark où guitare et voix s'entrelacent tristement, R.L. Burnside pour les morceaux où le blues se teinte de rock et où les riffs se font plus agressifs (That's All). Parfois fantasque, lorsqu'il fait part de sa lubie pour un gros tracteur vert John Deere (Big Green And Yeller), grave et sage quand il s'adresse à sa femme (My Home (Blue Eyes)), Steve touche son auditeur par l'enthousiasme et le cœur qu'il met dans chacune de ses chansons.


Impossible de résister à ce récit sur la cueillette des pommes (Wenatchee) ou au Seasick Boogie qu'il lance petit à petit. Steve prévient, il n'est pas près d'en rester là : « It'd be the death of me ».

Céline M.

Crédits photos : site officiel


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27/10/2009

Sonic Youth, Paris, Le Palais des Congrès, 25 octobre 2009



Le feu sacré


Le Palais des Congrès accueillait dimanche soir les New Yorkais de Sonic Youth, figures-phare du rock alternatif depuis bientôt trente ans. Malgré une salle inadaptée aux offices rock'n'roll, groupe et public sont parvenus à communier autour des titres de « The Eternal » – paru en juin dernier – parsemés de quelques morceaux piochés dans le répertoire des années 80.

Le grand amphithéâtre du Palais des Congrès est bien le dernier endroit où l'on se verrait assister à un concert de Sonic Youth. Terrassés dans leur fauteuil par les rafales de larsens, les martèlements de batterie et les hurlements de dément des très bruyants Sister Iodine de la première partie, les spectateurs se sont pourtant levés et massés vers le bas de la salle dès l'apparition des New Yorkais. Sur scène, Kim Gordon, élégante comme toujours, est encadrée de Thurston Moore, avec ses allures de grand adolescent dégingandé, à droite et de l'impassible Lee Ranaldo à gauche. Le discret bassiste Mark Ibold (Pavement, Pussy Galore), qui a participé à « The Eternal » en tant que cinquième membre du groupe, est un peu en retrait. Quant à Steve Shelley, il vient terminer la composition, surplombant les autres de derrière sa batterie. Les décors particulièrement soignés rendent un nouvel hommage – après le single Sacred Trickster – au peintre Yves Klein avec ces quatre grandes toiles inspirées de la série Anthropométrie qui entourent les musiciens et s'illuminent au fil des chansons.




Le concert débute avec No Way, tiré du dernier album que le groupe est venu défendre consciencieusement, car seul Thunderclap n'aura pas droit à son interprétation live. Dissonances harmonieuses, guitares et basses distordues qui se répondent ou s'enchevêtrent, soutenues par la batterie inébranlable, primaire sur Anti-Orgasm, de Shelley. Avec « The Eternal », le groupe a choisi de revenir vers le style noisy et underground qui a forgé sa réputation dans les années 80 et laissé de côté les tendances pop et presque mélodiques des deux albums précédents. Au chant, Kim Gordon est magnifique, enragée sur Calming The Snake, fragile dans l'épique Massage The History où Moore est à l'acoustique, sur un tabouret. Electrique le reste du temps, il semble monté sur ressorts et termine par terre quand il ne partage pas le micro avec sa femme ou Lee Ranaldo. La prestation est impressionnante. Si le groupe se consacre ce soir à « The Eternal », il glisse aussi dans le set des titres beaucoup plus anciens. La scène et le public s'enflamment pour Silver Rocket, extrait du monument de 1988 « Daydream Nation », où Sonic Youth est capable de la même intensité sonique qu'à ses débuts. Les morceaux des deux rappels proviennent d'ailleurs exclusivement des albums des années 80 et c'est Death Valley '69 qui achève le concert en une apothéose déviante et ultra violente. « Elle est retrouvée. Quoi ? – L'Eternité. »

Céline M.


Setlist :

No way / Sacred Trickster / Calming The Snake / Walkin' Blue / Stereo Sanctity, « Sister » (1987) / Anti-Orgasm / Poison Arrow / Antenna / Leaky Lifeboat / Silver Rocket, « Daydream Nation » (1988) / Malibu Gas Station / What We Know / Massage The History // Tom Violence, « Evol » (1986) / 'Cross The Breeze, « Daydream Nation » (1988) // Shadow Of A Doubt, « Evol » (1986) / Death Valley '69, « Bad Moon Rising » (1985)



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23/10/2009

The Heavy - « The House That Dirt Built » - Counter Records



Une maison hantée... plutôt sympathique !


Deux ans après un premier album déjà très prometteur, The Heavy livre aujourd’hui « The House That Dirt Built ». Un album où rock, funk, balades et ambiances cinématographiques se côtoient dans la plus parfaite harmonie.

Avec « Great Vengeance & Furious Fire », le groupe nous avait déjà habitués au mélange des genres. Si la recette est sensiblement la même sur ce deuxième opus, les courants musicaux sont, eux, différents. Morceau éponyme, The House That Dirt Built ouvre l’album comme l’on pousserait la porte de cette étrange demeure. Pour nous accueillir, une voix sévèrement burnée, tirée de la bande annonce du film d’horreur de série B « Don’t Go In The House », nous met en garde : « Don’t go in the house... If you believe in evil, don’t go in the house. (...) But if you do, don’t say we didn’t warn you... ». Autrement dit, « Ne rentrez pas dans la maison... Si vous croyez au diable, ne rentrez pas dans la maison. Mais si vous le faites, ne dites pas que l’on ne vous avait pas prévenu... ». Et pourtant, l’auditeur n’aura que faire de ces conseils. Curieux, inconscient du danger, il poussera la porte grinçante de cette étrange maison pour se retrouver nez à nez avec ses drôles d’habitants.

Clin d’œil au Panthéon du rock
Sans transition et toutes distorsions dehors, le disque enchaîne sur le très énergique Oh No ! Not You Again !!. Une pure folie rock’n’roll, presque punk, rendue publique sur internet avant même la sortie du disque. Puis, vient How You Like Me Now ? et sa rythmique de guitare funky, soutenue par des cuivres dignes des meilleurs enregistrements du regretté James Brown. La cohésion du groupe est exemplaire : chaque instrument est clairement identifiable, chacun est à sa place. De toute évidence, How You Like Me Now ? est l’un des meilleurs titres de ce nouvel opus. Inspirés par de multiples musiciens, les quatre Anglais n’ont pu s’empêcher de leur rendre hommage. Ainsi, Sixteen et ses chœurs terriblement bien pensés est agrémenté d’un sample à peine dissimulé de I Put A Spell On You. Screamin’ Jay Hawkins peut être fier, sa musique a traversé sans mal les générations et The Heavy assure la relève avec brio. Si l’introduction de The House That Dirt Built tournait en dérision l’esprit faussement flippant des films d’horreur de série B, l’hommage cinématographique de Short Change Hero est bien plus noble. La pluie, le bruit des santiags sur la terre battue, le tempo très lent de la mélodie de guitare, l’orage et l’arrivée d’une section de cordes plongent immédiatement l’auditeur dans l’univers western de Sergio Leone. Avec No Time, le groupe revient à des choses plus classiques. Ultra efficace, le riff de guitare de Daniel Taylor est propulsé par la lourde batterie de Chris Ellul. Mais, avant tout, c’est la voix de Swaby qui retient l’attention. Puissante, aérienne, elle donne au morceau toute son énergie. Plus calme, la piste suivante Long Way From Home rappelle l’atmosphère du premier album. Une petite descente chromatique empruntée à Ray Charles ponctue à merveille les couplets. Eclectique, le groupe s’essaie même au reggae sur Cause For Alarm. Sans être un modèle du genre, le titre s’écoute sans difficulté. Sur What You Want Me To Do ?, ces alchimistes du rock proposent de nouveaux clins d’œil au Panthéon du rock’n’roll. Toutefois, malgré un riff zeppelinien et un couplet calqué sur Five To One des Doors, le groupe a su préserver son identité. Seul bémol de ce disque pourtant très réussi, la ballade Stuck semble un petit peu fade au regard des autres compositions. Des violons qui pleurent, une mélodie de lover et peu d’originalité font de ce titre un élément loin d’être indispensable. Mais de manière générale, The Heavy confirme avec ce disque son statut de groupe à découvrir sans plus attendre. Un groupe qui, même en piochant dans différents styles, a su garder son identité.

Florian Garcia


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19/10/2009

Heavy Trash – « Midnight Soul Serenade » – Bronzerat




Sérénade en Trash


Si Heavy Trash, collaboration de choc de Jon Spencer (Blues Explosion) et Matt Verta-Ray (Speedball Baby) était à l'origine un projet secondaire, « Midnight Soul Serenade », le troisième album du duo depuis 2005 confirme l'importance du groupe. Toujours fidèles à leur héritage rockabilly, Charlie Feathers en tête, Spencer et Verta-Ray démontrent en onze titres explosifs leurs talents respectifs de chanteur et de guitariste. Ils prouvent aussi qu'ils sont capables d'aller encore plus loin en heavy et en trash.

Comme pour « Going Way Out With Heavy Trash », « Midnight Soul Serenade » a été enregistré avec différents groupes et dans deux studios : NY Hed – propriété de Matt Verta-Ray – à New York et Toe Rag à Londres. En plus d'utiliser le fameux studio analogique londonien, le voyage en Europe a permis à Heavy Trash de collaborer de nouveau avec le trio danois Powersolo, habitué des enregistrements et des tournées avec le duo. Pour les accompagner sur le reste de l'album, Jon Spencer et Matt Verta-Ray ont fait appel au contrebassiste Simon Chardiet (une pointure dans son domaine), au batteur Sam Baker, ainsi qu'à une poignée d'autres invités, dont Those Darlins, trio féminin country originaire du Tennessee. Un grand nombre de participations donc, pour un album aux influences plus variées dont les morceaux forment aussi un tout cohérent par le thème commun qu'ils abordent.



Macabre amour.
Quand Jon Spencer se met en tête de donner une sérénade, il y a toutes les chances pour que la romance vire au cauchemar. Jon n'est pas homme à conter fleurette ; dans les onze chansons de son nouvel album, il est question de relations humaines, mais souvent sous leur jour le plus sombre. Il faut dire que la pochette, avec les illustrations macabres du dessinateur français Jean-Luc Navette, donnait le ton. L'album réunit des morceaux aux rythmiques endiablées, agrémentés des solos de guitare du très doué Matt Verta-Ray, et se conclut sur des ballades où les sentiments en voient de toutes les couleurs.
« Midnight Soul Serenade » démarre sur les chapeaux de roue avec Gee, I Really Love You, titre délirant à l'auto dérision évidente. Spencer s'en donne à cœur joie, danse sur le fil du faux, dénaturant totalement le romantisme de ses propos. Suit le très fifties Good Man, interprété,
une fois n'est pas coutume, par Matt Verta-Ray, avec Thoses Darlins qui se chargent d'assurer les chœurs glamours et sexy. La femme, faible, est attirée par les apparences et la belle allure de « Mr Rock'n'Roll », mais elle se fourvoie... Heureusement, Matt est là pour l'aider à faire le bon choix. Bumble Bee le troisième titre est une reprise d'un morceau de la chanteuse rythm'n'blues LaVern Baker sorti en 1961. La version Heavy Trash est forcément plus féroce que l'originale, mais lorsque Spencer chante « You hurt me like a bee / A bumble bee / A evil bumble bee », il a l'air plus démoniaque que la personne responsable de ses maux !
The Pill est la pièce la plus curieuse de « Midnight Soul Serenade ». Déjà sorti en 2008 sur l'EP « Favoritenserie No. 2 » partagé avec Powersolo, ce morceau est le récit d'un bad trip scandé à la manière d'un Joe Gideon. Au doux et instrumental Pimento succède le très brutal (Sometimes You Got To Be) Gentle, chanson d'un homme résolu à obtenir ce qu'il désire, « I want you / I don't want anything else ». Le refrain implicite sur la violence sexuelle finalement perpétrée – « Stick it up inside / I'll push it up » – est répété à l'envi avec la voix d'un pervers bestial. Et dans le passage plus lent et lascif du morceau, la voix plus libidineuse encore de Spencer ne suggère que plus d'infamie.



Les morceaux suivants témoignent tous des aspects négatifs des relations amoureuses. In My Heart, qui boucle l'album, énumère néanmoins avec légèreté les raisons pour lesquelles le sentiment est nécessaire, voire indispensable au soulagement, « Like an addict needs a fix / Looking for peace of mind ». L'amour-drogue fait également l'objet du très nerveux Bedevilment (magnifique néologisme !) où les plaisirs du lit rendent complètement accroc. Jon Spencer rend d'ailleurs hommage à Jeffrey Lee Pierce du Gun Club et à son She Is Like Heroin To Me. Enfin, le chanteur multiplie les mises en garde sinistres dans la ballade rockabilly That's What Your Love Gets : « Broken heart / Broken promise / That's what your love is gonna get », reprises en chœurs suaves par tous les musiciens.

On l'aura compris, « Midnight Soul Serenade » enfonce le clou sur les horreurs de l'amour. Pourtant, les petits cœurs troués d'une balle de la pochette de l'album ne supportent pas la solitude dans Isolation. Et Sweet Little Bird, ballade à la sauce old west, s'achève sur ces mots « Come stay with me for a while / Yeah, I love you my darling ». Que ne ferait-on pour être à deux...

Céline M.



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16/10/2009

The Dandy Warhols – Chronique et Interview de Pete Holmström



« The Dandy Warhols Are Sound » - Beat The World


On n’attendait pas de leurs nouvelles de si tôt. Les Dandy Warhols ont publié cet été, le 14 juillet plus exactement – ça fait chic –, « The Dandy Warhols Are Sound », mix originel de « Welcome To The Monkey House » paru en 2003. Mais encore ?


The Dandy Warhols. Ah l’épineux sujet que voilà… Aussi brillants qu’ils peuvent être agaçants, aussi empruntés qu’ils peuvent être pertinents. On ne saurait cependant leur reprocher d’avoir longtemps eu une longueur d’avance. Pionniers (avec le frère ennemi/maudit The Brian Jonestown Massacre) du psychédélisme des années 90-2000 avec leurs deux premiers albums, puis devançant le fameux « retour du rock » de 2001 avec leur chef-d’œuvre « Thirteen Tales From Urban Bohemia » en 2000. C’est ensuite que les choses ont commencé à déraper avec « Welcome To The Monkey House » en 2003 qui, lui, anticipait le retour des sons synthétiques des années 80. Mais était-ce vraiment nécessaire ? Attention, qu’on se le dise, si le groupe n’a jamais retrouvé l’état de grâce des débuts, il n’en demeure pas moins que chacun de leurs disques parus depuis recèle son quota de bons morceaux et de mélodies pop. Et – petit deux – le quatuor, étonnamment stable et pérenne, n’a rien perdu de sa fantastique puissance sonique sur scène.

Seigneurs du son sur Terre venus de Mars. Libérés de leur maison de disque (maison de singe ?) Capitol et désormais leurs propres patrons via leur label Beat The World, les quatre de Portland tenaient semble-t-il à publier ces chansons telles que prévu initialement. D'abord mixées à New York au studio Electric Lady, elles subirent finalement un second mixage pour devenir la galette quelque peu indigeste qu’on sait. Visuellement le CD lui-même est mis en scène pour cette nouvelle mouture, largement raturé, à commencer par le logo de Capitol… L’album retrouve aussi son intitulé d’origine, « The Dandy Warhols Are Sound », titre un rien mégalo (I Am Sound étant l’un des morceaux les plus réussis), mais tout va bien : après tout, le groupe a bien sorti un « Odditorium Or Warlords Of Mars », puis « … Earth To The Dandy Warhols » ! L’ordre des chansons y est également différent (You Come In Burned, jam de fin à l’époque vient remplacer l’introduction), et les enchaînements soignés.

En l’état, l’album sonne un tantinet moins bodybuildé, ampoulé, surproduit. Plus humble. Mais ses travers demeurent, à savoir des synthés omniprésents, des guitares cruellement en retrait, et la tendance de Courtney Taylor à passer de sa sensuelle voix de crooner à celle de diva hystérique ; registre qu’il maîtrise tout autant, certes, mais qui ne produit pas le même effet sur l’épine dorsale. L’ensemble offre un son un peu plus vrai mais peut-être aussi plus plat, moins dynamique ; certains morceaux, rallongés, paraissent parfois plus monotones. En revanche, on y redécouvre des arrangements qui se révèlent et ressortent, comme sur The Last High avec sa partie instrumentale spatiale définitivement Bowie-esque (l’homme qui venait d’ailleurs), ou I Am Over It qui prend une tangente droguée avec une coda en forme de queue de comète acoustique…

Au bout du compte, on a pourtant du mal à y entendre autre chose que des versions alternatives. S’il ne renie pas « … Monkey House », on comprend aisément l’amertume du groupe d’avoir laissé son mix dans les cartons pour sortir cette année-là un disque travesti. L’affront est lavé, mais six ans après, cette nouvelle version ressemble surtout à du bonus réchauffé. Non, ce qu’il faudrait c’est un bon gros double live !

Flavien Giraud



The Dandy Warhols – Interview de Pete Holmström


En décembre 2008, la présence des Dandy Warhols à Paris - venus défendre
au Bataclan leur nouvel album « ...Earth To The Dandy Warhols » - avait été l'occasion de recueillir les propos du guitariste Pete Holmström. Contraint de rester à Portland, les mois suivants - crise oblige - le groupe ne s'est pour autant pas laissé abattre, a ressorti la version originale de « Welcome To The Monkey House », tourné aux États-Unis pendant l'été, faute de Vieux Continent, et atterri pour finir dans le désert californien en septembre pour le festival Clean Air Clear Stars. Là, Pete s'est à nouveau prêté au jeu de l'interview.



« Earth To The Dandy Warhols »
Plus d'un an après la sortie de l'album, Pete Holmström a le recul et la lucidité nécessaires pour affirmer qu'il n'est pas entièrement satisfait de ce sixième effort. Il a, pour la première fois en quinze ans, comme le sentiment d'une erreur quelque part ou d'un mauvais timing. « Nous nous donnons à fond pour essayer d'innover pour chaque album. Mais en ce qui concerne « ...Earth To The Dandy Warhols », je trouve qu'on ne s'est pas complètement donnés. Quand on fait un album, on est totalement pris par son processus de création et c'est comme si on oubliait ce qui se passe dans le monde extérieur. Quand le disque est sorti nous l'avons comparé au reste de l'actualité musicale... et pour la première fois, nous avons eu l'impression d'avoir sorti un album qui n'était pas pertinent, pas en rapport avec ce qui se passait. D'habitude, on sort des disques qui sont toujours un petit peu en avance sur leur temps – ce qui n'est pas non plus une bonne chose. Un jour, David Bowie nous a demandé : « Pourquoi vouloir être les premiers à faire quelque chose ? » Les précurseurs ont toujours un certain mérite, mais ils ne trouvent pas vraiment les moyens financiers d'en tirer parti ! En tout cas, c'est la première fois que j'ai eu le sentiment qu'on sortait un disque « vieux ». »

Un label, Beat The World...
Leur contrat avec Capitol derrière eux, les Dandy Warhols ont créé leur propre label, Beat The World pour sortir « Earth To... ». « Nous avons toujours eu le contrôle sur l’enregistrement et l’écriture de nos chansons. Maintenant nous contrôlons aussi la distribution, la promotion… C’est une expérience intéressante. » Aujourd'hui, deux autres groupes figurent sur le label des Dandys et jouissent de leur renom. « Nous nous sommes dit que ce serait une bonne idée d'essayer d'aider nos amis à sortir leurs disques. Malheureusement, la compagnie qui s'occupait de notre distribution a fait faillite, donc nous devons un peu revoir tout le projet. Ce que nous voulions offrir à Spindrift et The Upsidedown, c'était notre réputation. C'était la moindre des choses que nous pouvions faire car nous n'avons pas d'argent à leur donner pour les soutenir. Nous voulions aussi leur donner tous leurs bénéfices, contrairement à la plupart de ces labels qui prennent 95% de l'argent que les groupes gagnent. »

...et un studio, l'Odditorium
En dépit des difficultés, les Dandy Warhols disposent en Oregon d'un studio luxueux et convoité. « Au départ c’était un vaste espace qu’on a décoré, c’était censé devenir notre studio mais c’est la dernière chose qui s’y est mise en place finalement ! Quand nous y avons enregistré le précédent album, « Odditorium, Or Warlords Of Mars », ce n’était même pas encore vraiment un studio… Désormais, on peut dire que c’en est officiellement un. » A Portland, L'Odditorium est devenu un passage obligé pour les groupes en tournée dans la ville. « Pour ne pas l'utiliser que pour nos seuls disques, des groupes peuvent y passer, s’amuser et enregistrer, parfois à partir de choses faites par d’autres groupes venus avant. Nous-mêmes y passons beaucoup de temps. On y trouve toute la partie business avec le bureau de notre manager, le merchandising… Les vidéos, le web-design, tout se passe là-bas. »



« The Dandy Warhols Are Sound »
Soucieux de rétablir l'ordre des choses et profitant du temps laissé par l'annulation de leur tournée européenne, les Dandy Warhols ont donc publié cet été la version originale de « Welcome To The Monkey House » faisant ainsi la nique à leur ancien label : « C'est quelque chose que nous avions toujours voulu faire... « The Dandy Warhols Are Sound », c'est comme ça qu'on allait l'appeler à l'époque. Mais quand notre label Capitol a commencé à faire sa loi et à tout bousiller, on a décidé de le nommer « Welcome To The Monkey House » car ça illustrait parfaitement notre situation. On se demandait vraiment : « Qu'est-ce qui se passe ici bordel ?? ». »
La différence entre les deux ? « Ce sont les mêmes chansons mais les mixages sont différents, du coup l'ordre des chansons aussi. Dans « The Dandy Warhols Are Sound » les morceaux s'enchaînent naturellement alors que dans « Monkey House », c'est juste une série de chansons, les unes après les autres. L'album est plus organique et s'inscrit plus logiquement dans la progression de nos disques que « Monkey House ». Je pense que je préfère notre version originale. »



Quinze ans de Dandys
Voilà déjà quinze ans que les Dandy Warhols officient à quatre, avec un seul changement de batteur en 1998. Quinze ans, pour le pire et pour le meilleur. « Au début, nous étions tous amis, on formait un gang, on traînait ensemble tout le temps, c'était nous contre le monde entier. Nous n'avions ni famille, ni femme. Nous sommes tous mariés désormais, certains ont des enfants, il y a dans nos vies des choses plus importantes que le groupe, ça fait relativiser... Nous avons une relation de travail maintenant. Je joue avec beaucoup d'autres musiciens à côté, mais il y a quelque chose qui se passe quand nous jouons tous les quatre qui ne se produit pas avec d'autres personnes. Jouer ensemble est quelque chose de très facile. Nous savons exactement ce que les autres vont faire, ce qui est à la fois une bonne et une mauvaise chose, parce qu'il n'y a pas de surprise. C'est d'ailleurs pourquoi j'ai besoin de jouer dans d'autres groupes, pour trouver de l'inspiration.
Nous ne sommes pas amis mais nous formons comme une famille. Les amitiés peuvent être fugaces, on est ami avec quelqu'un un jour et un peu plus tard, c'est terminé. La famille a quelque chose de sûr. Je ne dis pas ça de manière négative, je trouve ça très bien et je pense que c'est la seule manière de continuer ensemble. Je pense que tous les groupes qui sont restés ensemble aussi longtemps que nous sont aussi passés par là. On essaye de voir ce qu'on peut faire pour que ça marche parce que les relations humaines sont complexes ! En particulier avec les ego de chacun. Tout ce qui touche à la création touche à l'ego ! On veut que les autres personnes nous voient. C'est fou que ça ait duré aussi longtemps mais je ne vois pas pourquoi ça ne continuerait pas.
»

Propos recueillis par
Flavien Giraud en décembre 2008
et Céline M. en septembre 2009

Crédits photos : Myspace et site officiel




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08/10/2009

The Heavy, Paris, Point Ephémère, 28 septembre 2009





The Heavy, poids lourd du rock anglais !


A quelques jours de la sortie de leur deuxième album « The House That Dirt Built », The Heavy était, lundi 28 septembre dernier, en concert au Point Ephémère (Paris). Une prestation qui, bien évidemment, fit la part belle aux nouveaux morceaux. Récit...

Après une courte première partie assurée par le trio français Lilly Wood & The Prick et quelques minutes nécessaires au changement de plateau, les lumières du Point Ephémère s’éteignent enfin. Dans l’obscurité la plus totale, The Heavy investit la scène et ouvre ce concert avec Short Change Hero, intro que l’on croirait tout droit sortie d’une BO d’un film de Tarantino. Ambiance western intrigante, reverb Fender et tremolo poussés à fond, cette attaque de concert tout en douceur sera vite dissipée par la folle énergie des autres titres. Réputé pour sa parfaite maîtrise de la scène, le chanteur Kelvin Swaby explose dès le deuxième morceau, le célèbre Coleen extrait du premier album. Bien plus agressif que sur le disque, cette version électrifiée est intense, vicieuse, presque sexuelle... Le ton du concert est donné. Les morceaux suivants seront issus du nouvel album : Sixteen avec les très réussis chœurs de Dan Taylor (guitare), Spencer Page (basse) et Chris Ellul (batterie), What You Want Me To Do avec son intro zeppelinienne et son riff calqué sur Five To One des Doors et enfin Cause For Alarm aux évidentes sonorités « reggae ».




Plaisirs du live. Toujours aussi énergique, le groupe enchaîne avec un autre succès du premier album, Set Me Free. Quelques minutes plus tard, sur Girl, Swaby teste avec un plaisir non feint son pouvoir de séduction auprès de la gent féminine. Sourire en coin, l’œil malicieux, désignant même les demoiselles du doigt, les invectives du chanteur sont suffisamment explicites pour attiser le désir du public féminin. Petits plaisirs du live et de la liberté qu’offrent les concerts aux artistes, le titre se terminera en clin d’œil aux Kinks (All Day And All Of The Night) et aux Doors (Hello, I Love You) dont Swaby s’amusera à reprendre les paroles. Puis, vient l’heure du très funky How You Like Me Now ? Avec sa rythmique impeccable, son phrasé digne d’un James Brown et son irrésistible groove, le titre déchaîne le public déjà en nage. La tension retombe pour quelques instants avec Bruckpocket’s Lament et son tempo plus lent. Le calme avant la tempête en quelque sorte... Car le groupe finira son set par un de leurs titres les plus énervés, No Time. Abasourdis par la prestation des quatre Anglais, le public comprend que le concert touche à sa fin. C’est donc avec ferveur qu’il supplie le groupe de remonter sur scène. Touché de l’ovation que lui a réservé le public parisien, The Heavy reviendra pour un dernier titre, Oh No ! Not You Again !. La version la plus rapide et rock n’ roll qui ait jamais été jouée...


Florian Garcia








Set list :

Short Change Hero / Coleen / Big Bad Wolf / Sixteen / What You Want Me To Do / Cause For Alarm / Set Me Free / Girl / Love Like That / That Kind Of Man / How You Like Me Now ? / Bruckpocket’s Lament / No Time / Oh No ! Not You Again !




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02/10/2009

Heavy Trash : troisième album et tournée française





Talk about the blues ?


C’est le retour du slap-back et des pelle-à-tartes ! Heavy Trash revient en album et en concert ce mois-ci. Les gominés new-yorkais Jon Spencer et Matt Verta-Ray, jamais à court de furieuses bluettes rock’n’roll couleur Cadillac, vont à nouveau raviver la flamme des pionniers, Chuck Berry, Link Wray et consort. A paraître le 12 octobre, « Midnight Soul Serenade » a été enregistré entre New York et Londres (au célèbre studio analogique Toe Rag) et succèdera ainsi à « Going Way Out With Heavy Trash » paru il y a deux ans.
D’ici-là, le groupe, assurera quatre dates en France (Nancy, Paris, Besançon, Tourcoing). L’occasion d’entendre en avant-première les onze titres de ce nouveau brûlot rockabilly. Le concert au Trabendo, ce mercredi 7 octobre, verra également la participation des très fifties The A-Bones ; mais aussi de T-Model Ford, blues-man de la génération de Junior Kimbrough et RL Burnside, signé comme eux sur le mythique label Fat Possum, et dont le nouvel album paraîtra cet hiver sur Alive Records.


Flavien Giraud


Tracklisting :

01. Gee, I Really Love You
02. Good Man
03. Bumble Bee
04. Pill
05. Pimento
06. (Sometimes You Got to Be) Gentle
07. Isolation
08. Bedevilment
09. Sweet Little Bird
10. That's What Your Love Gets
11. In My Heart



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The Morning After Girls : Interview de Sacha Lucashenko et E.J. Hagen




Psychédélisme à l'australienne


S'ils essaiment aujourd'hui un peu partout dans le monde, les groupes qui se revendiquent de l'influence des années 60 trouvent toujours asile sur la côte ouest américaine. Proches du Committee To Keep Music Evil, en tournée cet été avec The Warlocks, The Morning After Girls – aux deux fondateurs australiens – ont su reconnaître leurs semblables. Rencontrés dans le désert californien pour le festival Clean Air Clear Stars où ils se produisaient à quatre, sans leur batteur, Sacha Lucashenko et E.J. Hagen évoquent nonchalamment leur histoire.



Histoires de groupe. Passions, rancœurs et bouleversements définissent une part du passé australien des Morning After Girls. « Quand nous étions en Australie, il y a eu une histoire de couple dans le groupe et certains ont fini par être de trop. » De fait, Miss Aimee Nash et Scott Von Ryper ont quitté la formation (« je dirais plutôt qu'ils ont été virés ») pour créer The Black Ryder, au rock de la même veine. Mais la rupture n'ébranle pas les fondations de The Morning After Girls qui repose sur ces deux membres originaux Martin Sleeman et Sacha Lucashenko. Ce dernier souligne d'ailleurs que les deux anciens membres « n'ont jamais rien apporté aux compositions et n'ont pas eu d'influence sur le groupe. »
Du renouveau s'imposait. « Martin et moi avons décidé de partir aux États-Unis, à New York, il y a deux ans, où on a rencontré E.J., le bassiste, Alexander White et Anthony Johnson. E.J. a fait un essai avec nous complètement bourré et n'a pas loupé un seul rythme ! On n'en revenait pas ! »
C'est cette nouvelle formation de The Morning After Girls qui a tourné pendant un mois cet été avec les Warlocks. « Par la suite, notre batteur a dû rentrer à New York. Nous avons donc entamé la tournée sur la côte ouest avec Asteroid #4 à quatre, sans lui. Nous avons repensé toutes les chansons pour l'occasion et créé un set et un environnement beaucoup plus intimes... C'est bien aussi de jouer sans batteur. Je ne pense pas que tout le monde en soit capable. Les voix et les harmonies sont tellement puissantes dans nos compositions que nous pouvons le faire, en toute confiance mais j'ai hâte que nous soyons cinq de nouveau. »

Alone. La tournée de l'été 2009 a facilité la promotion d' « Alone », le second album du groupe, disponible sur i-tunes uniquement. « Nous avons enregistré presque tout l'album dans une vieille église à Melbourne et un peu dans ma chambre. C'était avant de partir pour les États-Unis. Les plus gros labels sont venus vers nous et nous ont proposé de sortir notre disque mais ils ne voulaient rien nous donner en échange, pas même nous aider à organiser une tournée. Nous nous sommes donc débrouillés seuls, avons fait des tournées et joué malgré tout, en espérant que l'un d'entre eux sera tenté de repenser sa proposition. Nous mettons de l'argent dans ce que nous aimons faire, nous attendons que ça marche, mais nous ne voulons pas nous faire avoir ! »

Leurs influences ? « Les classiques. Sacha et Martin, Alex et moi, sommes dans des groupes et jouons ensemble depuis 15 ans. Nous avons grandi avec la même musique... la musique des années 60 et du début des années 90 en Angleterre, Slowdive par exemple. C'est bizarre d'ailleurs car nous venons de deux endroits opposés sur le globe et nous avons la même collection de disques.
Nous créons des disques dignes de l'âge d'or, en nous inspirant de tous les grands, mais sans non plus sonner daté. Tous les bons trucs viennent des années 60, beaucoup se sont répandus à cette époque et sont encore influents aujourd'hui ! Il manque à beaucoup de groupes actuels la dynamique que l'on trouve dans les classiques. »

Comme leurs compatriotes australiens The Lovetones, les musiciens de The Morning After Girls gravitent autour du Committee To Keep Music Evil et d'Anton Newcombe son fondateur. Ne figurant pas sur le label, le groupe a pourtant eu l'occasion de tourner en 2005 avec le Brian Jonestone Massacre, rencontré l'année précédente au cours d'un concert mémorable : « C'est le concert le plus incroyable que j'ai jamais vu, de la colère, de la joie sur scène, c'était tellement pas pro ! C'était dingue ! » Et comme la scène psychédélique américaine s'étend jusqu'à Portland dans l'Oregon, The Morning After Girls sont aussi en rapport avec les Dandy Warhols. « Nous avons enregistré quelques morceaux à l'Odditorium [le studio des Dandys, ndr]. Ça a été une bonne session et il y a deux ou trois chansons que nous pensons retravailler pour le prochain album. »

Propos recueillis par Céline M.


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01/10/2009

The Morning After Girls - « Alone »




Matin Austral


De discussions de comptoir en plans quinquennaux, il y a longtemps à Rock Times qu’on souhaitait évoquer les émissaires australiens du psychédélisme. La sortie cet été de « Alone », deuxième effort des Morning After Girls, tombait à point nommé.


L’Australie donc, d’où s’échappent des volutes éthérées comme autant de signaux de fumée pour rappeler que la Californie n’est pas la seule terre fertile pour un psychédélisme florissant. C’est bien simple, depuis les sixties jamais on n’avait entendu autant de sirènes et de mélopées concoctées par d’humbles (ou presque) chantres d’une musique aux vertus psychotropes. C’est là-bas, quelque part sur leur vaste île, que sont nés les Lovetones, Black Ryder, et, donc, The Morning After Girls. Qui, comme d’autres, ont connu un parcours semé des embûches de l’underground. On les avait laissés à Melbourne, en 2005, avec le très prometteur « Shadows Evolve », somme des deux EP produits par le groupe jusqu’alors. Après quelques remaniements de personnel plus ou moins douloureux (la scission avec Miss Aimee Nash et Scott Von Ryper, partis fonder The Black Ryder), les voici qui renaissent, quatre ans plus tard, resserrés sur les deux leaders/fondateurs, Sacha Lucashenko et Martin Sleeman, avec cet album, « Alone », enregistré entre Melbourne et Londres avant que le groupe ne s’installe à New York. Symptôme de l’ère du temps, celui-ci n’est disponible qu’en téléchargement, faute de mieux et de contrat valable. C’est la crise, chacun pour soi, seul contre tous.

Seuls. Sur « Alone » pas de changement de direction notoire, mais une belle errance psychédélique. Comme dans l’opus précédent, on retrouve ce goût pour les harmonies vocales léchées, qui évoquent tour à tour les envolées des Dandy Warhols de Courtney Taylor (The Best Explanation), ou encore celles du Black Rebel Motorcycle Club. Ailleurs on reconnaît l’influence d’Anton Newcombe et du Brian Jonestown Massacre, Death Processions en tête. On pense parfois aussi aux « aînés » My Bloody Valentine, The Jesus And Mary Chains et Spacemen 3 (The General Public). Et dans leurs moments les plus purs, There’s a Taking et Still Falling flânent même du côté de la dream-pop. On a vu pire héritage ! Comme leurs pairs, les Morning After Girls se plaisent à enchevêtrer de claires rythmiques acoustiques aux tortueuses guitares électriques et lointaines mélodies fuzz. Au milieu de tout cela, Part Of Your Nature répond parfaitement aux canons psychédéliques, et la reverb cotonneuse aux couleurs matinales demeure une arme certaine du groupe.

Tout au plus on regrettera que ne s’insinuent pas plus les arrangements et vibrations de tambourin et autres guitares tremolo qui brillaient sur Lazy Grey ou Chasing Us Under dans « Shadows Evolve », sur lequel ils se permettaient même une embardée punk (Hi-Skies). Pour le reste, ces douze titres en sont les dignes successeurs, moins enlevés et peut-être moins évidents et immédiats. Plus mélancoliques aussi. Mais « Alone » ressemble à l’album de la résurrection d’un des principaux espoirs de l’ère psychédélique australienne des années 2000, ce qui, déjà, n’est pas rien.


Flavien Giraud


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